The
music of chance (La musique du hasard) - 1990
[Paru
aux Editions Actes Sud, 1991, 312 pages, ISBN 782742-700837]
Auster
nous convie à une randonnée existentielle : celle d'un homme
qui, après avoir confié sa fille à sa sœur, se retrouve
sans attache, pris dans le tourbillon d'une errance désespérée
qu'il ne comprend pas lui-même. Cette dynamique incontrôlable
le pousse à sillonner les Etats-Unis en voiture. Il rencontre,
au son de La Musique du hasard, des personnages surgis de
nulle part qui vont donner un tour extraordinaire à cette
fuite en avant. Il serait criminel d'en révéler plus, tant
le suspense est efficace. Disons juste que l'on se retrouve
dans une sorte de quatrième dimension où les manipulateurs
demeurent invisibles, où les maquettes figurent des maquettes
de maquettes, où la fin n'est qu'un recommencement... Le
ton se veut neutre et lisse; il a l'objectivité d'un observateur
extérieur. Le caractère imperturbable de la narration n'en
sert que mieux la montée de l'angoisse qui, si elle s'accélère
par moments, est toujours latente dans cette démonstration
du pouvoir catalyseur et versatile de l'argent. (Commentaire
de Sana Tang-Léopold Wauters). Nashe, qui a hérité de deux
cent mille dollars, se débarrasse de ce qu'il possède, achète
une voiture et entreprend de sillonner l'Amérique. Ainsi
rencontre-t-il Pozzi, professionnel du poker, avec qui il
décide de miser le restant de sa fortune dans une partie
" facile " contre deux millionnaires excentriques, Flower
et Stone. Et le plus extravagant commence alors... A chacun
de ses romans, Paul Auster révèle une nouvelle dimension
de sa maîtrise romanesque.
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"Pendant
une année entière, il ne fit que rouler, aller
et venir à travers l'Amérique en attendant
l'épuisement de ses ressources. Il n'avait pas prévu
que cela durerait aussi longtemps mais, d'une chose à
l'autre, quand il eut enfin compris ce qui lui arrivait,
Nashe avait dépassé tout désir d'en
finir. Le troisième jour du treizième mois,
il rencontra le gosse qui se faisait appeler Jackpot. Ce
fut l'une de ces rencontres accidentelles qui semblent surgies
du néant par hasard - rameau brisé par le
vent, tombé soudain à vos pieds. Si elle s'était
produite à n'importe quel autre moment, il est probable
que Nashe n'aurait pas ouvert la bouche. Mais parce qu'il
avait déjà renoncé, parce qu'il estimait
n'avoir plus rien à perdre, il considéra cet
inconnu comme l'occasion d'un sursis, une dernière
chance de réagir avant qu'il fût trop tard.
Et c'est ainsi qu'il se lança. Sans le moindre frisson
d'inquiétude, Nashe ferma les yeux et sauta."
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